Michel de Montaigne

Montaigne, Essais III-2, Du repentir

Introduction

Montaigne nous a annoncé : « je suis moi-même la matière de mon livre ». Ce texte explique et justifie son dessein d’entreprendre une autobiographie, c’est à dire peindre son « moi » tel qu’il le conçoit. L question qui se pose est bien évidemment celle de la finalité : une autobiographie dans quel but ? Dans un premier temps, nous définirons les caractéristiques de cette entreprise autobiographique. Dans un second temps, nous montrerons que le but de Montaigne est de peindre « l’humaine condition ». Et enfin, dans un troisième temps, nous étudierons le lien que l’auteur entretient avec son ouvrage.

I. Les caractéristiques de l’autobiographie

1. Montaigne est le mieux placé pour entreprendre l’étude de sa vie

La connaissance de « moi » ne peut être confiée à une personne étrangère : « en celui là (en ce projet), je suis le plus savant homme qui vive ».

2. Une étude fondée sur l’expérience

Contrairement à l’imposteur dont la « capacité est en lieu d’où il l’emprunte et non en lui » (l.32), c’est en lui que Montaigne trouve son inspiration. L’inspiration est le maître des essais, c’en est d’ailleurs une définition.

3. Fidélité

La fidélité telle que l’entend Montaigne n’est pas contrairement à Rousseau une fidélité absolue : « je dis vrai, non pas tout mon saoul, mais autant que je l’ose dire » (l.24), c’est une concept relatif de la vérité. Montaigne s’engage à parler mais sans sévérité excessive.

II. Le dessein de Montaigne peint « l’humaine condition »

1. Montaigne précurseur des sciences humaines

Le but de Montaigne est de peindre l’homme, la nature humaine. L’objet de la curiosité de Montaigne, c’est l’homme, car il y a carence en la matière : l’humanité ne se pense pas suffisamment. C’est une invitation à fonder les sciences humaines. Montaigne décrit sa démarche exactement comme s’il parlait d’une démarche scientifique. Il vient d’en définir l’objet : l’homme, or toute science est définie par son projet. Il est donc le précurseur de ce qu’on appellera plus tard les sciences humaines (psychologie..).

2. L’acquisition d’une certaine sagesse

S’il étudie la nature humaine, c’est dans le but d’en tirer des règles morales. La métaphore culinaire implique l’idée de nourrir le lecteur. Il s’agit pour Montaigne de se forger une philosophie morale. Le mot « Philosophe » est à prendre au sens étymologique du terme de sagesse.

III. Lien auteur-ouvrage

1. Les Essais n’ont pas de fil directeur

Montaigne nous explique ce que ne sont pas les Essais. Il ne s’agit pas d’ouvrage obéissant à des critères formels sophistiqués.

Pour illustrer sa pensée, Montaigne choisit la métaphore musicale. Les Essais sont le contraire des « fantaisies de la musique » qui « sont conduites par art », c’est à dire dans l’harmonie, avec un fil directeur. Les Essais sont un éparpillement : ils suivent le hasard de la vie.

2. « Mon livre et moi »

L’expression « mon livre et moi » donne l’impression que l’un renvoie à l’autre, comme l’ouvrage à l’ouvrier. Ils forment un couple indissociable.

Conclusion

L’autobiographie n’est pas seulement l’instrument de connaissance du moi. Il est tout autant destiné au lecteur et à l’ensemble des hommes. Car en lui même, il est la forme entière de l’humaine condition.

Cet exercice, ce « passage » se définit donc comme l’art de vivre. C’est l’attitude de la maturité car, au terme d’une vie durant laquelle il aura tour à tour essuyé la doctrine stoïcienne puis le scepticisme, le voici dans son âge de sagesse.

Du même auteur Montaigne, Essais, Avant-propos Montaigne, Essais, Chapitre 50, Sur Démocrite et Héraclite Montaigne, Les Essais II-17, De la présomption, Autoportrait Montaigne, Essais III-13, De l'expérience Montaigne, Essais III-9, L'Art de voyager Montaigne, Essais II-18, Du démentir Montaigne, Essais III-9, De la Vanité, Laisse lecteur courir encore ce coup d'essai Montaigne, Essais I-30, Des Cannibales Montaigne, Essais III-9, De la Vanité, A sauts et a gambades Montaigne, Essais III-6, Des coches

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