Sarraute, Enfance, Les Amis Russes, Quand je regarde […] L’espionnite
Introduction
Retracer ses expériences personnelles est sans doute l’une des activités humaines les plus anciennes, dont témoigne l’abondance des créations dans de nombreux domaines, de la littérature à la peinture. C’est une méthode souvent utilisée par les auteurs pour faire un bilan de son vécu et ainsi exorciser ou mieux comprendre certains souvenirs, certaines sensations… L’auteur doit aussi s’engager vis-à-vis du lecteur à restituer la vérité et ainsi établir un climat de confiance. C’est sur cette interrogation de la « vérité » que Nathalie Sarraute base son roman « Enfance » dans lequel elle nous raconte sa petite enfance auprès de se parents. Nous analyserons ce travail de l’écriture et de la restitution du vécu suivant trois axes : le monde des adultes, des souvenirs terribles et enfin la réaction de l’enfant.
I. Le monde des adultes
A. Des exilés vieillissant
Retranscription des invités (les amis de son père).
Fatigue : « des gens vieillissant », « mélancoliques », « fatigués ».
Russe (noms propres) : « Micha », « Péréverzev », « Ivanov », gens ordinaires : « je me dis qu’on ne pourrait jamais devinez à quel point ils sont hors du commun.
Fuient l’oppression : réfugié (anciens résistants).
B. Des souvenirs terribles
La forteresse de « Schlusselbourg » construite en 1323, objet de nombreuses batailles, reconquise définitivement par Pierre le Grand aux Suédois en 1702, fut très rapidement transformée en prison. Cette forteresse devint au cours des années 1880 le symbole de l’enfermement tsariste. On la surnomma en cette fin de XIXème siècle « la bastille russe », le règlement étant, même s’il varie selon les périodes, des plus rigoureux : isolement, surveillance constante, interdiction de parler, d’écrire.
Exil (opposition au régime), Okhrana (police politique), Cent Noirs (groupe politique monarchiste).
C. La réaction de l’enfant
Admiration : « hors du commun », « êtes extraordinaires », « je les confonds tous dans la même admiration ».
II. L’imagination romanesque
A. Accumulation des exploits
Accumulation : « enfermé dans des cachots », « condamné à la pendaison », ils ont attendu la mort avec sérénité… ».
Prolongement (utilisation du conditionnel) ? imagination : « quand ils serraient au pied du gibet, quand le bourreau… » (imagination de l’enfant, créativité en sommeil).
B. Jugement radical
« grâce » ? condamne l’attitude de ceux qui ont demandé grâce.
Lâcheté / compromission (noir/blanc ? manichéen) : « infamante ».
(vision restrictive de l’enfant, prémices de la conception entre le bien et la mal).
III. Le portrait du héros : Mr Ivanov
« Mais celui que j’aime le plus… C’est Monsieur Ivanov ».
Incarnation du héros (idéalisation d’un personnage, volonté de suivre un idéal).
A. Physique
« traits délicats » / « pétrit de bonté » / « elle irradie ».
Fatigue / mélancolie : visage (« yeux », « poches », « bégaiement »).
B. Moral
Bonté (parallèle au visage) : « pétrit de bonté ».
Séquelle : bégaiement (pendaison commué en détention à perpétuité) / « espionnite » (néologisme).
« j’ai entendu dire », source extérieure.
Courage : (sans compromission) : « commettre » (connotation péjorative) / emprisonnement (45 ans enfermé).
Conclusion
Vision de l’adulte transformée par le regard de l’enfant (éloges / passé héroïque de résistant).
Superposition des points de vue : Nathalie Sarraute adulte / enfant.