Dramaturge et romancier français.
Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux naît à Paris le 4 février 1688, quinze ans après la mort de Molière. Fils d’un bourgeois directeur de la Monnaie Royale, il passa une grande partie de son enfance en province. A l’instar de son père, Marivaux s’essaya d’abord au droit, études qu’il abandonnera pour l’écriture. En 1710, il fréquentait déjà les salons parisiens, dont il reprendra l’atmosphère et les manières dans ses écrits journalistiques, dans le Nouveau Mercure de 1717 à 1719 et par la suite dans son propre journal, Le Spectateur Français de 1720 à 1724.
En 1720, Marivaux est pris par deux événements importants : toute sa fortune – issue d’un riche mariage – disparaît dans le scandale de la faillite de la banque Law, et sa première pièce, « L’Amour et la vérité », est mise en scène. L’échec de sa pièce « Annibal, tragédie en 5 actes et en vers » (1720) le convainquirent que l’héroïsme et les vers classiques requis par le Théâtre Français (la Comédie Française) ne convenaient pas à son écriture, au contraire d’ « Arlequin poli par l’amour » dont la fantaisie avait rencontré le succès avec le Théâtre Italien. Le Théâtre Italien de Lelio, qui était financé par le régent Philippe d’Orléans, devint alors son terrain d’expression favori. Les acteurs principaux de ce théâtre au jeu brillant et vivant, Thomassin et Silvia, interpréteront désormais les amoureux des pièces de Marivaux : le valet Harlequin et l’Ingénue. La comédie en prose irrégulière, qui apparaissait à l’époque comme un genre mineur, était alors méprisée par beaucoup de ses contemporains dont Voltaire.
Deux pièces permettent de caractériser le théâtre de Marivaux : « Arlequin poli par l’amour » et « Le jeu de l’amour et du hasard » (1730). On y retrouve un sens développé des nuances et des différents registres de l’émotion, et des jeux de mots habiles et spirituels. On y retrouve surtout le thème de la découverte de l’amour, d’un homme et d’une femme qui ne reconnaissent leurs sentiments qu’après l’intervention des autres personnages, alors que ces sentiments sont évidents depuis le début de la pièce pour le spectateur. L’obstacle à l’amour n’est plus, à la différence de Molière, un père tyrannique, mais la complexité des cœurs et de l’âme des protagonistes, complexité qui fera l’objet d’une exploration subtile. La préciosité verbale qu’on connaît aujourd’hui sous le nom de marivaudage est le reflet de la sophistication et de la sensibilité de cette époque. Le réalisme fait des avancées importantes dans les pièces de Marivaux : les serviteurs y ont des vraies émotions, et le milieu social est dépeint avec précision. Marivaux écrira une trentaine de pièces, dont les plus importantes, outre les deux citées ci-dessus, sont « La surprise de l’amour » (1722), « La double inconstance » (1722) et « Les fausses confidences » (1737).
Après des succès importants au début, les pièces de Marivaux seront de plus en plus critiquées et auront de moins en moins de succès, amenant Marivaux à se tourner progressivement vers d’autres formes d’expression: journalisme, romans ou essais. Parmi celles-ci, deux romans inachevés, « La vie de Marianne » et « Le paysan parvenu » montrent le plus clairement la psychologie humaine selon Marivaux. Le premier célèbre les sentiments et les émotions de la femme, tandis que le second est le récit d’un jeune et beau paysan qui profite de l’attirance qu’il a auprès des femmes plus âgées pour évoluer dans la société.
Même si Marivaux fut élu à l’Académie française, il ne connut pas la renommée de son vivant. Il décéda dans la pauvreté, et son oeuvre ne reconnue que lorsqu’elle sera redécouverte par Sainte-Beuve au dix-neuvième siècle. Depuis, il ne sera dépassé en nombre de représentations et en gloire que par Molière.