II. L’irréversibilité du temps qui passe et la pérennité de l’amour
1. La fuite du temps
Le vieillissement traduit le temps qui passe, « rien n’avait changé mais tout avait vieilli », nous avons l’idée de totalité qui signifie que rien n’échappe au temps. L’insistance est mise sur la dégradation physique qui n’échappe pas au poète, « mes tempes et mes yeux » ; le changement du cadre de la nature, le jaunissement des feuilles traduit le changement de saison, c’est à présent l’automne, la saison du souvenir et de la nostalgie. Le souvenir est détaillé dès le vers 4, il est mis en valeur au niveau spatial, « Et loin des coquillages s’accrochaient désespérément aux rochers de la mer ». Le souvenir est tant physique que sentimental, la tendresse prend le dessus, l’écrit poétique fait revivre le sentiment, ainsi que le suggère le chiasme du vers 5, « ta tendre présence » et « la présence transparente », nous comprenons que la présence de la femme aimée est réelle, intacte dans le souvenir. La mer est le lieu érotique avec la métaphore du poète qui s’accroche au souvenir d’amour. L’adverbe « désespérément » fait écho au vers 10, « toujours illusoires ».
2. L’immutabilité du cadre
Nous avons un cadre statique marqué par l’imparfait pour souligner la durée, des répétitions, « la même place » et une insistance sur l’immutabilité du contexte avec, « rien n’avait changé », il va pourtant se heurter au vieillissement, « tout avait vieilli », les effets du temps sont ainsi relativisés. Le destinataire semble ainsi fondu dans le cadre. La femme aimée est évoquée à travers « ton », « ta », « tu » mais elle n’est pas identifiée, le pronom personnel « tu » est associé à un lieu, il y a entre eux deux, une sorte de dialogue fictif entre le « je » et le « tu ». Ce dialogue est surréaliste.
L’impossibilité d’un retour en arrière au niveau temporel contraste avec la pérennité de l’amour, ce dernier est partagé, « tu te rappelles », cela s’inscrit dans une question rhétorique, l’idée d’un amour éternel transparaît avec la présence absente de la femme. Absente, car il y a le souvenir même invisible. « Dans bien longtemps tu m’as aimé » traduit l’association du passé et du futur, donc une certaine ambiguïté qui marque néanmoins la durée éternelle de l’amour.
De tous ces contrastes, le lecteur à la lecture du poème a une impression de passage entre deux mondes, le réel et l’imaginaire.