Proust, Du côté de chez Swann, Le souvenir de Combray
Introduction
A la recherche du temps perdu est l’une des plus importantes œuvres romanesques du XXème siècle. Le narrateur (souvent identifié à l’auteur, Marcel Proust) cherche à recomposer dans l’écriture les étapes successives du travail de la mémoire. Le premier volume intitulé Du côté de chez Swann, met en scène les épisodes marquants de l’enfance du narrateur. Le début du roman consacre de longues pages à l’épisode du coucher dans la maison familiale de Combray. Dans ce passage, nous verrons en quoi ce souvenir est traumatisant, puis nous nous intéresserons à la réflexion sur le cheminement de la mémoire.
I. Un souvenir traumatisant
1. L’évocation d’un Combray angoissant
Du côté de chez Swann, appartient au sous-genre du roman autobiographique. Il mêle donc la fiction du romain au caractère réel de l’autobiographie. Aussi Combray est-il un nom fictif, cette ville s’appelle en réalité Illiers. Dans la première partie du texte, Proust restitue le souvenir de Combray et du drame du « coucher » sous forme descriptive et expressive. Le caractère le plus frappant de cette restitution est celui du souvenir partiel, découpé, mutilée. Il réduit Combray à « deux étages » (l.14). La périphrase « l’auteur inconscient de mes tristesses » accentue cette idée de tristesse, malheur vécu dans le silence.
De plus, le décor décrit est inquiétant, apeurant : « l’allée obscure », « le tronc fort étroit », « l’obscurité ».
2. Le travail de la mémoire sélective
Le souvenir est ici rendu de façon mutilée, comme si sa mémoire « n’acceptait » que cette petite partie de Combray : c’est une mémoire sélective.
L’embrayeur du souvenir est ici le fait que l’auteur soit pris d’insomnies récurrentes qui provoque un retour au passé : « je me ressouvenais ». La métaphore de l’édifice qui représente la mémoire, associée au verbe « sectionnant » signifie bien l’apparition d’une mémoire sélective.
II. Une réflexion sur le cheminement de la mémoire
Dans la deuxième partie du texte, l’auteur fait une digression explicative et un commentaire généralisant à propos du souvenir ; il s’agit d’une réflexion sur le cheminement de la mémoire.
1. Références aux exemples
Dans ce texte, Proust illustre ses réflexions par deux exemples importants.
Le premier exemple est celui de l’anecdote de Combray raconté dans la première partie : c’est un exemple fondé sur son vécu, mémoire sélective.
Le second exemple est celui de « la croyance celtique » qui explique la remémoration du souvenir à partir d’un sens : on peut penser à l’épisode de la madeleine, mémoire affective qui s’oppose à la « mémoire de l’intelligence ».
2. Opposition mémoire volontaire / involontaire
La mémoire volontaire (ou mémoire de l’intelligence) consiste à un effort fait de la part de l’individu pour évoquer son passé. Selon Proust, c’est « peine perdue ». La mémoire volontaire s’avère être un échec.
La deuxième mémoire est la mémoire affective, ou involontaire, est dû à une « sensation » qui va faire revivre un souvenir enfoui dans « l’édifice » de la mémoire. La mémoire volontaire « du coucher » n’est que partielle et ce n’est que le « hasard » qui constitue les limites de cette réminiscence. Le souvenir est donc limité.
Conclusion
Ainsi, à travers une autobiographie romancée, Proust parvient à réfléchir sur le cheminement de la mémoire et sur les mystères de la réminiscence. On peut rapprocher par son insistance sur la mémoire involontaire ce texte de l’épisode de La grive de Montboissier de Chateaubriand, où l’auteur par le biais de l’ouïe (chant d’une grive) fait resurgir des souvenirs de où il a passé sa jeunesse.