L’État peut-il être impartial ?

L’État de son étymologie status signifiant stabilité a longtemps occupé une place prépondérante au sein des sociétés modernes dans lesquelles nous vivons car il vise avant tout l’équilibre. Il est ainsi courant depuis Hegel  d’opposer l’Etat à la société civile. Notion impersonnelle d’un groupement de personnes et d’individualités, l’Etat s’efforce à tendre vers la collectivité plutôt que dans la banalité et l’individu emprisonné dans ses désirs égoïstes. Cependant, la notion même d’Etat supposerait ainsi au sens même l’administration de celle-ci car elle s’oppose au pouvoir direct et à la monopolisation du pouvoir susceptible de menacer l’équilibre d’une nation. La question fait ainsi surface : L’Etat peut-il être impartial ? Afin de répondre à cette question, nous verrons dans une première partie, que l’Etat se doit d’être impartial, ce qui renvoie à la notion de justice étatique, mais que dans une deuxième partie la notion même d’impartialité est un idéal, voire une illusion étatique.

I. L’État doit être impartial

Il est en effet du rôle et du devoir de l’État d’être impartial, car l’impartialité signifie être équitable, juste dans ses jugements rendus. La question est donc ici de savoir si l’Etat doit ne favoriser aucun parti pris à travers ses jugements et rester toujours dans l’image collective qu’individuel tout en sachant que l’Etat est dirigé par un groupement d’hommes imparfaits pouvant et souvent étant soumis à l’influence de leurs jugements propres. Il appert donc que l’impartialité découle premièrement de la notion de justice qui règne dans le pays en vigueur. Si la justice est donc l’acte de donner chacun ce qu’il mérite nous aimons citer la maxime : «  on récolte ce que l’on sème. » Mais bien que dura lexsedlex comme le dit le dicton, la loi est dure mais c’est la loi, il est important de souligner le caractère d’impartialité de l’Etat dans un jugement quelconque. En effet, n’est-ce pas à l’État de se montrer impartial et juste car l’Etat dispose ainsi du droit de sanction et de la capacité d’émettre les lois relatives à un Etat ? Thomas Hobbes dans le Léviathan, indique que sans État, l’homme est un loup pour l’homme, car en effet, l’individu recherche au fond de lui des intérêts qui l’opposent aux autres. La société demeure ainsi dans le risque de déséquilibre et de destruction car les intérêts individuels ne riment pas avec le bien collectif, et dans cette mesure, l’État doit être impartial car en vue de garantir l’équilibre général, l’État se doit de rendre des jugements justes et sans prise de partie. Ce constat sera repris par Hobbes toujours, en affirmant qu’il faut donner tout le pouvoir à l’État ou léviathan dont la vertu selon lui est d’être au-dessus des parties, car bien évidement quand il y a litige entre deux parties, il faut une troisième partie pour trancher. L’État selon Hobbes ou le Léviathan se doit donc d’être le plus impartial possible, et on retrouve le principe de transfert de pouvoir individuel au collectif ce qui distingue l’État de la monarchie ou l’Oligarchie ou la tyrannie, modèles de gouvernement politique diamétralement opposés à l’idéal social. L’État doit donc être impartial car comme le dit Rousseau dans le contrat social, les individus aliènent leur droit et cèdent leur pouvoir à une entité plus grande, visant à un intérêt plus large.  Ainsi, le dogme de l’impartialité réside tout d’abord dans l’essence même de la justice car être impartial c’est être capable de juger sans être influencé par des éléments exogènes. L’État remplit alors parfaitement ce rôle car il amène les individus à vivre en harmonie, et les apprend à vivre ensemble dans la cohésion sociale. L’impartialité est donc non seulement un désir mais une obligation de tout État qui se dit gouverner la cité comme le disait Aristote, « L’homme est un animal social et politique appelé à vivre dans la cité. »

II. L’impartialité est cependant un idéal et quelquefois une illusion étatique

L’État n’est pas toujours cependant impartial comme le montre l’histoire de l’humanité au travers des guerres de religion ou des guerres de pouvoir. En effet, le concept même d’impartialité revête quelque chose de plus complexe, de plus ambigu mais surtout plus paradoxal qu’il n’y parait. L’impartialité implique en effet plusieurs facteurs qui bien souvent ne sont pas regroupés lors du jugement. Dire que la personne qui juge est impartiale implique tout d’abord que celle-ci connaisse parfaitement les statuts et les lois à faire respecter mais aussi les sanctions qui y sont rattachées car le droit de manière bicéphale, et donc l’impartialité consiste à ériger des droits mais également des sanctions dans le cas où celles-ci ne sont pas observées. En effet, l’État n’est pas toujours impartial à cause de la complexité même de cette notion, il est difficile de véritablement rendre un jugement complètement juste quand on y pense. D’ailleurs, si l’État avait réussi pleinement cette mission, nous n’aurions pas eu d’inégalités sociales dans nos sociétés contemporaines, et donc nous n’aurions pas eu de guerres et de conflits. Cela réduirait ainsi l’État à un monstre froid comme le disait Nietzsche car l’État assurant l’harmonie sociale institue des fonctions régaliennes de justice et de Police, mais pourtant, le mal-être social et l’injustice sont encore bel et bien présents dans nos sociétés contemporaines. L’impartialité est donc une illusion étatique car elle exige une parfaite maitrise de la notion de droit mais surtout une parfaite application de celle-ci au sein de la cité tout en sachant que les hommes ne sont pas justes de nature et que leurs penchants les entrainent à transgresser les interdits sociaux. L’État se doit donc d’être impartial par principe, à l’instar de ce médecin qui a des obligations de moyens et non de résultats, car en vue de la situation actuelle, le monde est soumis à une grande vague d’injustice sous quelque forme qu’elle soit, ce sont les mêmes hommes qui ont institué les mêmes lois qui les transgressent, paradigme plus que paradoxal. Et cette limite de l’impartialité de l’état se retrouve prioritairement dans les inégalités sociales et donc les maux d’un pays que sont la pauvreté, l’inégalité sociale ou encore l’injustice. Karl Marx dans la lutte des classes sociales soulignait cette non-partialité de l’État, car si il y a inégalités de lutte dans les classes sociales, cela signifie qu’il n’y a pas d’équité, et donc d’égalité : l’état n’est donc pas totalement impartial car l’impartialité est un idéal non une réalité comme le dit Hegel dans son livre sur la Philosophie du droit naturel.

Comme l’a supputé Thomas Hobbes dans son célèbre livre Léviathan : “Là où il n’y a pas de puissance commune, il n’y a pas de loi ; là où il n’y a pas de loi, il n’y a pas d’injustice. La force et la ruse sont, en guerre, les deux vertus cardinales.” Effectivement, l’impartialité de la loi exige donc bel et bien l’existence de lois pour qu’il n’y ait pas d’injustice dans la vie sociale. Il appert que l’état se doit donc d’être impartial car la notion de justice est ainsi reflétée par l’impartialité de l’État au sein de la société mais aussi l’argument de la rétribution sociale : chaque individu mérite de semer ce qu’il a récolté. Nonobstant, dans cette poursuite de la justice sociale, l’impartialité de l’État est plus un idéal qu’une réalité, une utopie qu’une vérité : une illusion étatique. « Tous les hommes naissent libres et égaux en droit. » dit-on, mais l’État a-t-il la capacité d’affecter la mentalité d’un individu afin de le faire prendre conscience qu’il appartient à un schéma beaucoup plus grand que lui : la société. L’État se doit donc de ne pas jouer le rôle de monstre totalitaire ni d’instrument au service d’une individualité, mais plutôt commun à vocation sociale essayant de transcender les barrières socio-cu

 

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