Hugo, Claude Gueux, Résumé
Claude Gueux, un réquisitoire contre l’injustice
Claude Gueux est un roman de Victor Hugo paru en 1834 dans La Revue de Paris. Bien avant Robert Badinter, l’écrivain offre dans cet ouvrage un vibrant plaidoyer contre les peines et les conditions carcérales disproportionnées en ce milieu du 19ème siècle, ainsi qu’un réquisitoire contre la peine de mort. Tout au long du livre, on assiste à l’émergence d’une idée d’abord timide, puis de plus en plus obsédante : celle d’une meilleure justice pour une meilleure société.
Un banal fait divers
Avant de devenir le personnage central d’un livre écrit par un monument de la littérature française, Claude Gueux fut d’abord le héros d’un fait-divers. Victor Hugo découvrit son histoire en feuilletant la Gazette des Tribunaux en 1832 reproduisant un jugement de la Cour d’Assises de Troyes condamnant à mort un prisonnier au nom éponyme. Victor Hugo venait de terminer l’écriture d’un ouvrage abolitionniste intitulé « Dernier jour d’un condamné » et a trouvé dans cette histoire, pourtant ordinaire pour l’époque, un écho à son combat contre la peine capitale.
L’action du livre
L’histoire de Claude Gueux débute à Paris en 1831. D’une musculature vigoureuse, il est habile et très travailleur. Il vit avec une jeune fille qui est sa maîtresse et un enfant qui ne semble pas être le sien. À 36 ans, il n’a pas reçu beaucoup d’éducation, puisqu’il ne sait ni lire ni écrire, mais cela ne l’empêche pas d’avoir des idées pertinentes et intelligentes. Pendant un terrible hiver, l’ouvrage vient à manquer et pour subvenir aux besoins de sa famille, il se met à voler. Son maigre butin permet aux siens de manger du pain et de se réchauffer durant trois jours. Pour Claude Gueux, c’est une sentence lourde qui l’attend, puisqu’il va être condamné à une peine de cinq ans de travail à la Maison Centrale de Clairvaux.
La vie à Clairvaux s’écoule de façon monotone. Le matin, il travaille à l’atelier et le soir, il retourne dans son cachot. Avec son humeur égale et son charisme naturel, Claude Gueux s’attire la sympathie des détenus et des geôliers, dont le directeur de l’atelier appelé M.D. Au début, il s’était plutôt attiré les faveurs de cet homme tyrannique et cruel qui avait reconnu la qualité de son travail. Ce fut même par M.D. qu’il apprit que sa concubine était devenue une prostituée. Claude Gueux noue une amitié très forte avec le jeune Albin qui partage souvent avec lui sa maigre pitance. L’amitié entre ces deux personnages évolue rapidement vers un fort lien filial.
M.D., de plus en plus hostile à la popularité dont jouit le prisonnier, décide de les séparer en transférant Albin dans un autre quartier de la prison. Cet éloignement provoque chez Claude Gueux une amère déception d’autant plus que le directeur est incapable de lui expliquer le motif de sa décision. Chaque jour, Claude Gueux prie M.D. de faire revenir son ami en lui expliquant leur accord tacite sur le pain, leur amitié et le poids de la solitude. M.D. reste sourd à ses sempiternelles sollicitations, mais le prisonnier ne se décourage pas. Il a en effet un comportement exemplaire et reste toujours de marbre face aux provocations et aux brimades des surveillants. Le 25 octobre, il donne un ultimatum à M.D., lui enjoignant de lui rendre Albin avant le 4 novembre.
Le 4 novembre, il prend une hache et explique qu’il compte tuer M.D. le soir même. Il le glisse sous son pantalon devant vingt-sept prisonniers impassibles. À la tombée de la nuit, il réunit ses camarades d’infortune pour consulter leur conscience en leur répétant sa décision d’assassiner le directeur. Il promet toutefois de le supplier une dernière fois, au cas où son entêtement aurait fait place à plus de discernement. Puis, avant de se rendre à cette entrevue fatidique, Claude Gueux embrasse ses compagnons dans de joyeuses accolades et distribue ses affaires comme s’il ne devait jamais revenir.Deux heures plus tard, après avoir essuyé un énième refus, le héros porte quatre coups de hache mortels sur la tête de M.D. Puis, à l’aide d’une paire de ciseaux, il se poignarde à vingt reprises, mais ne peut atteindre le cœur. Il s’écroule au sol dans une mare de sang et ne reprend connaissance que bien plus tard dans une infirmerie tenue par de bonnes sœurs.
Après de longs mois où il manque plusieurs fois de succomber à des fièvres mortelles, il comparait le 16 mars 1632 devant la Cour d’Assises de Troyes. Son attitude noble pour un homme sans instruction fait forte impression dans l’assemblée. Dans un vibrant discours, il rappelle le motif principal de son acte. Il a mis fin à des humiliations quotidiennes en éliminant un tyran ivre de son pouvoir. Toutefois, les jurés ne se laissent pas convaincre et il est condamné à la peine capitale. Des âmes charitables lui proposent de l’aider à s’évader, mais il refuse. Il attend calmement la mort.
L’histoire prend fin avec l’exécution publique du supplicié qui adopte pour ce dernier voyage la même attitude remarquable et courageuse qu’il avait su montrer durant tout son procès. Il a gardé sa dernière pièce dans sa poche, afin de la donner aux pauvres sur le chemin.
Les personnages
Sur une quarantaine de pages, on suit divers personnages. Certains sont fortement présents et constituent le fil conducteur du livre. D’autres sont plus discrets, voire effacés. Pourtant, leur présence est cruciale pour expliquer la déchéance de Claude Gueux.
Claude Gueux : il a 36 ans lorsqu’il commet le vol qui va l’envoyer dans la prison de Clairvaux. Même s’il est d’une grande bonté et suscite le respect de ses codétenus et des gardiens, la société est restée intransigeante à son égard.
Albin : bien qu’il paraisse plus jeune que son âge, Albin n’a que 20 ans. Il protège Claude Gueux et le sauve plusieurs fois de la faim en prison.
Le Directeur des Ateliers : d’une extrême dureté, il reste sourd à toutes les doléances de Claude Gueux. Son nom reste inconnu. Il est désigné par les initiales M.D. dans le livre.
Les prisonniers : ils ont de la considération pour le courage et la ténacité de Claude Gueux.
La femme et l’enfant : c’est pour eux que le héros du livre a volé de la nourriture
La morale du livre
À la fin du livre, l’auteur nous met face à un dilemme moral malaisé. Il interpelle sur la vision contrastée que nous pouvons avoir du héros s’il est une victime ou un bourreau. Claude Gueux n’avait rien d’un voleur ni d’un assassin. Il est devenu ce « monstre » impitoyablement dépeint par les tribunaux à cause de la misère et plus gravement en raison d’une justice qui se vautre dans l’injustice. Finalement, le livre est un hymne dédié à tous les déshérités et les laissés-pour-compte de la société.