Flaubert, Un cœur simple, Résumé
L’enfance de Félicité ne fut pas heureuse. A la mort de ses parents, elle fut placée comme vachère au service d’un fermier qui la maltraita. Après que ce dernier l’eût injustement accusée de vol, Félicité rejoignit une autre ferme comme fille de basse-cour. Ses patrons l’aimaient bien et quand elle eut dix-huit ans, ils l’emmenèrent à l’assemblée de Colleville où elle fit la connaissance de Théodore. Il tenta d’abuser d’elle, mais Félicité se débattit et s’échappa. Lors d’une nouvelle rencontre, Théodore admit qu’il avait trop bu et demanda à Félicité de lui pardonner. Il la courtisa mais Félicité, mue par la raison et le sens de l’honneur, ne céda pas à ses avances. Ce n’est que lorsque Théodore lui avoua qu’il avait peur de la conscription que Félicité lui ouvrit son cœur. La couardise de ce dernier était pour elle une preuve de tendresse et elle accepta de l’épouser. Mais le jour de son mariage, Félicité apprit que Théodore avait déjà épousé une femme très riche pour échapper au service militaire. Submergée de chagrin, elle pleura toute la nuit et quitta la ferme pour se rendre à Pont-l’évêque. Elle rencontra Madame Aubain, qui avait perdu son mari au début de l’année 1809. Sans fortune et endettée, Madame Aubain n’avait gardé de ses propriétés que les fermes de Toucques et de Geffosses ainsi qu’une maison peu dispendieuse à Pont-l’évêque où elle vivait avec ses deux enfants, Paul âgé de sept ans et Virginie âgée de 4 ans.
Félicité fut embauchée comme cuisinière et emménagea dans une chambre de la maison. Elle se prit d’affection pour les enfants malgré les réticences de leur mère qui était de nature peu avenante. Félicité était aussi une maîtresse femme, travailleuse, pieuse et courageuse. Habituée aux vaches, elle fit preuve d’un grand sang-froid un soir où, revenant de Geffosses en compagnie de Madame Aubain et des enfants, elle détourna l’attention d’un taureau prêt à les charger. Virginie fut fort impressionnée par l’incident et tomba malade. Monsieur Poupard, le docteur, préconisa des bains de mer et la famille partit pour Trouville où Félicité retrouva l’une de ses sœurs accompagnée de ses enfants. Elle les aima et les gâta au grand dam de Madame Aubain qui n’appréciait guère que le neveu de Félicité, Victor, tutoyât son fils Paul. Elle décida de rentrer à Pont-l’Evêque, et d’envoyer Paul au collège de Caen. Félicité reporta toute son affection sur Virginie qu’elle accompagna au catéchisme.
Félicité n’entendait rien aux dogmes, mais elle fut subjuguée par l’Histoire Sainte. Après la première communion de Virginie, Madame Aubain envoya sa fille au pensionnat des Ursulines d’Honfleur. Félicité qui s’ennuyait, demanda à sa maîtresse de recevoir son neveu. La requête acceptée, Victor vint déjeuner avec sa tante tous les dimanches après la messe. Il était devenu marin et ses histoires de voyage distrayaient Félicité qui le gâtait en retour. Mais un lundi 14 juillet 1819, Victor lui annonça qu’il embarquait pour l’Amérique et qu’il serait peut-être absent deux ans. Félicité ne manqua pas de le recommander à Dieu, mais quelques temps plus tard, une lettre de son beau-frère lui annonçait que Victor était décédé. L’affliction qui toucha Félicité était d’autant plus profonde que l’état de santé de Virginie était également préoccupant. Un jour, Madame Aubain, qui se rendait auprès de sa fille tous les mardis, quitta précipitamment la maison en compagnie du docteur Poupart pour le pensionnat. Elle ne rentra pas de la nuit et Félicité, inquiète, prit la diligence de Lisieux pour se rendre au couvent où la sœur portière l’informa du décès de Virginie. Félicité s’occupa de la défunte avant son inhumation au cimetière de Pont-l’Evêque. Durant des années, Virginie demeura le sujet de conversation de Félicité et de Madame Aubain, qui évoquaient son souvenir à maintes occasions. Malgré tout, La vie reprit son cours, rythmée par les fêtes religieuses, les faits-divers, les choses de la vie et la Révolution de Juillet. Un nouveau sous-préfet, le baron de Larsonnière, fut nommé. Il s’installa avec sa femme, sa belle-sœur, ses trois filles et Loulou, un perroquet, non loin de chez Madame Aubain. Il fut nommé quelques temps plus tard à une Préfecture, et la famille déménagea. La baronne, son épouse, fit don de Loulou à Madame Aubain qui ne tarda pas à le confier définitivement à Félicité.
Cette dernière avait tout de suite aimé ce perroquet parce qu’il venait d’Amérique et qu’il lui rappelait son neveu Victor. Elle lui voua une passion démesurée et entreprit de lui apprendre des politesses. Un jour où il faisait chaud, Félicité mit Loulou dehors pour le rafraîchir, mais le perroquet fugua. Terriblement inquiète, Félicité s’épuisa à le chercher et contracta une angine puis elle eut mal aux oreilles. Trois ans plus tard, elle devint sourde et perdit ses esprits. A l’hiver 1837, Félicité découvrit Loulou, mort dans sa cage. Inconsolable, elle fit empailler son perroquet sur les conseils de Madame Aubain. Elle enferma Loulou dans sa chambre et se remémorait le passé en le regardant. Félicité s’enfonça progressivement dans la torpeur. Quand elle contemplait le Saint-Esprit à l’église, elle imaginait que Dieu n’avait pas pu choisir une colombe pour s’annoncer puisque cet oiseau ne parle pas, et que c’était vraisemblablement un ancêtre de Loulou que le Très-Haut avait désigné.
Madame Aubain décéda à son tour au mois de mars 1853, à l’âge de soixante-douze ans. Paul, qui s’était marié à l’âge de 36 ans, accourut de Besançon en compagnie de sa femme pour vider la maison de ses meubles, et la mettre en vente. Félicité, devenue aveugle, eut terriblement peur d’être renvoyée car sa chambre offrait un parfait abri à Loulou à qui elle vouait un culte idolâtre. Elle vécut chichement dans la maison de Madame Aubain qui se délabrait. Félicité finit par tomber malade après Pâques, où elle contracta une pneumonie. Le moment des reposoirs approchait, et Félicité se désolait de ce qu’elle n’avait rien pour orner celui qui devait être placé dans la cour de Madame Aubain. C’est tout naturellement qu’elle pensa à Loulou qui était sa seule richesse. Son état s’aggravant, Félicité fit appeler un prêtre pour recevoir l’extrême-onction. Puis, alors qu’elle parlait à des ombres, la Simonne, restée à son chevet, lui présenta le perroquet afin qu’elle lui fît ses adieux. Félicité qui était aveugle, embrassa le front de Loulou et le garda contre sa joue, sans s’apercevoir que des vers le dévoraient et que l’animal était dans un très mauvais état. Puis la Simonne reprit Loulou et le déposa sur le reposoir. Félicité vécut jusqu’à la Fête-Dieu où son agonie commença. Alors que la procession se rangeait dans la cour de Madame Aubain autour du reposoir où trônait Loulou, elle demanda à la Simonne qui la veillait, si ce dernier était bien. Puis, alors qu’elle rendit son dernier soupir, elle vit un gigantesque perroquet planer au-dessus de sa tête.