Voltaire, Le Monde comme il va, Résumé
Missionné par un ange
L’histoire débute par l’arrivée d’un ange puissant nommé Ituriel dans la demeure du scythe Babouc située sur le rivage du fleuve Oxus en Asie centrale. Le visiteur explique à son interlocuteur humain qu’une assemblée a eu lieu la veille pour savoir si les anges doivent exterminer ou non les Perses habitant la célèbre cité de Persépolis. Afin d’être certain de la décision à prendre, Ituriel demande à Babouc de se rendre dans la ville et de lui faire un rapport sur le comportement de ses habitants. Bien que le Scythe ne soit jamais allé à Persépolis, l’ange l’a choisi pour sa partialité, son discernement et sa capacité à inspirer la confiance chez autrui.
Une sanglante bataille
Acceptant la mission d’Ituriel, Babouc quitte donc sa demeure et rencontre en chemin l’armée des Perses qui est en route pour affronter l’armée indienne. Il parle alors avec un soldat perse et son capitaine et leur demande la cause de cette bataille imminente. Les deux hommes lui répondent qu’ils n’en savent rien et que leur métier consiste à faire la guerre et non à la comprendre. Babouc interroge alors un de leurs généraux qui lui explique que cette guerre est due à une querelle entre un eunuque d’une femme du roi des Perses et un commis d’un bureau du roi de l’Inde. Le lendemain, la bataille commence et elle s’avère sanglante pour les deux armées. De nombreux soldats se font même tuer par leurs propres frères d’armes. Observant avec tristesse ces horreurs, Babouc est alors convaincu que les habitants de Persépolis doivent être annihilés par les anges. Pourtant, il change rapidement d’avis lorsque les deux camps finissent par déclarer la paix et qu’il apprend que des soldats, aussi bien perses qu’indiens, se sont conduits dignement sur le champ de bataille. Optimiste et apaisé, Babouc reprend la route et rejoint Persépolis.
Une ville entre le vice et la vertu
Babouc pénètre dans la cité, se mêle à sa foule et entre dans un temple. Il est choqué par le comportement des gens dans cet édifice sacré : ils parlent fort, sont sales, sentent mauvais et ils enterrent même un mort à l’intérieur du temple ! Cependant, lorsque le Scythe visite d’autres temples, admire les beautés architecturales de la ville et constate que certains habitants se comportent de manière civilisée et pieuse, il change d’opinion.
Quelques heures plus tard, il passe la soirée chez une dame en compagnie de convives qui semblent agréables. Il se rend toutefois compte que la maîtresse des lieux trompe son époux avec un jeune mage et que de nombreux invités pratiquent l’infidélité au sein de cette demeure. La dame confie à Babouc que la tromperie est courante dans les foyers de Persépolis. Il apprend également que les postes les plus haut placés, notamment dans la justice ou dans l’armée, appartiennent à ceux qui sont les plus aisés.
La soirée terminée, Babouc entre dans un des plus beaux temples de la cité. À l’intérieur, un mage parle du vice et de la vertu sur un ton pompeux à une assemblée d’hommes et de femmes fascinés par sa prétendue érudition. Sortant du temple, le Scythe se rend à une fête publique où il côtoie des personnes aussi belles de caractère que d’apparence. Sur scène, les artistes qui interprètent le rôle de rois, de reines, de héros et d’héroïnes des légendes perses sont d’ailleurs si touchants que Babouc finit par être ému au point d’en verser quelques larmes.
Ensuite, Babouc fait la rencontre d’un marchand qui escroque tout d’abord le Scythe en lui vendant un produit bien plus cher que sa valeur réelle, pour ensuite lui rapporter la bourse qu’il a oubliée dans son échoppe. Déstabilisé, Babouc interroge le marchand sur son attitude contradictoire. Le commerçant lui répond que ses prix malhonnêtes lui permettent de rémunérer de nombreux employés tout en vivant dans le luxe.
La leçon des sages lettrés
Plein d’incertitudes quant à son ressenti général par rapport aux habitants de Persépolis, Babouc souhaite s’entretenir le lendemain avec des mages et des lettrés. Il pense en effet qu’en vouant respectivement leur existence à la sagesse et à la religion, ces personnes se montreront peut-être plus vertueuses que la plupart des habitants qu’il a rencontrés jusqu’ici. Il se rend donc à un collège de mages et rencontre un archimandrite qui lui avoue avoir perçu en échange de son vœu de pauvreté pas moins de cent mille écus de rente. Babouc rencontre deux autres mages dont les pensées et les agissements s’avèrent en total désaccord avec les idéaux de sagesse, d’humilité, et de désintéressement qu’ils enseignent aux autres.
Babouc dîne ensuite avec quelques lettrés. Le Scythe connaît une nouvelle déception : les convives se montrent jaloux les uns envers les autres, insultants, individualistes… Il constate que leurs travaux littéraires ne sont pas meilleurs et qu’ils reflètent le caractère puéril et égocentrique de leurs auteurs. Écœuré, Babouc jette tous ces textes au feu, puis sort pour se rafraichir l’esprit après tant de déceptions.
Au cours de sa promenade, il rencontre un vieux lettré dont le comportement solitaire et humble tranche avec ceux qu’il a côtoyés plus tôt. Babouc lui fait part de sa déception mais le vieil homme lui explique qu’il existe malgré tout à Persépolis des individus et des ouvrages encore dignes de son attention. Un autre lettré se joint alors à leur conversation et le Scythe devient admiratif devant la sagesse qui émane des propos de ses deux interlocuteurs. Les deux sages lui apprennent qu’il se focalise trop sur le mal au détriment du bien, que d’autres lettrés et mages sont, comme eux, dénués de jalousie et que même ceux qui s’avèrent corrompus peuvent, d’une certaine façon, être utiles au peuple.
Lorsque Babouc évoque la corruption des jeunes magistrats qui monnayent leurs places, le vieux lettré lui rétorque que cela ne les empêche pas d’être de bons juges. Pour illustrer ses arguments, le sage conduit Babouc au grand tribunal dès le lendemain. Les décisions juridiques des jeunes juges le surprennent : elles s’avèrent justes et sensées. Babouc se réconcilie alors avec les habitants de Persépolis en comprenant que des comportements en apparence contradictoires peuvent s’avérer complémentaires et bénéfiques pour un royaume et ses sujets.
La dame et le ministre
Babouc se rend alors dans la demeure d’un ministre dont l’antichambre est occupée par des dames, des mages, des juges, des marchands et des officiers qui se plaignent tous de lui. Mais lorsqu’il le rencontre, le Scythe est pris de compassion pour ce petit homme âgé mais à l’esprit encore vif et qui souffre d’une image injustement dégradée. Alors qu’il s’entretient avec le vieil homme, la dame chez qui Babouc avait dîné quelques jours plus tôt entre dans la pièce. Les larmes aux yeux, elle supplie le ministre d’aider son époux qui s’est vu injustement refuser un poste qu’il méritait. Babouc est étonné par le comportement de cette femme à l’égard d’un homme qu’elle n’aime pas. Le Scythe avait en effet appris lors de la soirée que celle-ci le trompe avec un amant, tandis que lui la trompe avec une maîtresse. Lorsqu’il l’interroge sur ce sujet, la dame lui répond qu’elle aime sincèrement son mari et porte même sa maîtresse en grande estime ! Elle conclut en invitant Babouc à dîner chez elle le soir aux côtés de son amant, de son époux, et de la maîtresse de celui-ci, afin que le Scythe constate qu’ils entretiennent une relation respectueuse les uns envers les autres. Le dîner se passe en effet de manière très agréable.
Le lendemain, la dame emmène Babouc dîner chez une jeune femme qu’elle nomme « la belle Téone ». Le Scythe tombe littéralement sous le charme de cette belle Perse aussi belle que noble dans ses attitudes
Le compte-rendu de Babouc
Alors que les jours passent, Babouc prend conscience que la cité de Persépolis et ses habitants ont fini par conquérir son cœur. Il a donc peur que le compte-rendu qu’il doit remettre prochainement à l’ange Ituriel ne soit plus objectif. Il décide donc de ne pas lui communiquer ce rapport sous forme de mots. Il fait forger par le meilleur fondeur de la cité une petite statue constituée de pierres et de métaux aussi bien précieux que communs. Il apporte cette dernière à Ituriel et lui demande si l’ange oserait la briser sous prétexte qu’elle ne soit pas exclusivement composée d’or et de diamants. L’ange comprend aussitôt la portée symbolique de l’objet et décide finalement de ne pas exterminer les habitants de Persépolis, concluant que « si tout n’est pas bien, tout est passable ».